2e dimanche de l'Avent - Évangile selon saint Marc (Mc 1, 1-8)
Où va la vie ? Dans l’existence quotidienne, au long des heures de travail, au milieu de la foule, face à tant de drames qui nous trouvent impuissants, la question se creuse en nous : « La vie va-t-elle seulement vers la mort » ? La vie n’est-elle que la vie ? « Consolez, consoler mon peuple », dit Dieu.
« Lève la voix avec force, toi qui portes la Bonne Nouvelle.
Où va la vie ? Il ne s’agit pas d’apporter une réponse, mais de prolonger encore la force de la question en constatant que la première réponse n’est pas de l’ordre des idées.
Chacun le sait : on ne peut jamais empêcher quelqu’un de désespérer : aucun argument, aucune promesse, aucune lumière, aucun amour n’empêcheront quelqu’un de désespérer, s’il désespère !
Mais chacun doit aussi reconnaître qu’aucun démenti, aucune horreur, aucune souffrance, aucunes ténèbres n’empêcheront quelqu’un d’espérer, s’il espère… Voilà les deux faits devant lesquels nous place notre vie… Et voici que nous osons dire : c’est l’espérance qui a raison !
Non pas que nous, chrétiens, aurions une arme secrète pour justifier l’espérance.
Nous ne pouvons qu’annoncer une seule nouvelle : l’espérance à raison car nous osons espérer ! C’est de l’intérieur même du fait qu’espérer que je dis que l’angoisse n’a pas le dernier mot, et je n’ai pas d’autre façon de le dire ; Nous ne pouvons dire à la face du monde que l’espérance a raison que par le fait d’espérer.
C’est au désert que commence à s’entendre la Bonne Nouvelle.
C’est dans ce lieu de la faim, de la soif, de la chaleur, du froid que cette terre symbole de nos contradictions, de nos craintes, de nos désirs, que nous sommes convoqués. Nous voici appelés au lieu de notre vérité : au désert, les mirages sont mortels. Et c’est là, en ce lieu où la lumière démesurée été le vide impossible à camoufler font tomber nos masques et retomber nos rêves, c’est là que retentit la Parole. Qui la croira ?
Au fond de ce désert – un désert n’a-t-il jamais été fécond ? – une parole brûle les lèvres d’un pauvre homme, sans pouvoir ! Et cette parole modifie le cours de l’Histoire !
« Voici venir l’Envoyé » ! La terre a beau être désolée, déjà s’annonce le salut. Nul hiver ne désespère que renaisse le printemps ; nulle nuit ne s’étire sans l’espoir que vienne l’aurore et le soleil : l’amandier fleurira, et avec lui le désert éclatera un cri de joie !
Oui, nous osons espérer ! D’où naît cet espoir démesuré ?
D’une parole, d’une promesse ?
Mais qu’elles seraient fragiles, si nous n’avions aperçu sur notre terre un reflet de l’éclat qu’elles annoncent !
Nous osons croire en la vie parce que Dieu, le premier, a cru en elle. Notre espérance n’est pas le seul approfondissement de nos espoirs d’hommes ; elle ne jaillit pas d’en bas, sorte de fusée exploratrice que nous lancerions vers l’infini. Notre espérance naît de cette assurance que Dieu, en Jésus, a choisi le parti de la vie. Il a décillé les yeux de ceux qui ne pouvaient pas voir, et nous pouvons regarder notre avenir. Il a fait se laver les boiteux, les paralysés, et nous pouvons repartir debout, libérés des peurs qui nous immobilisaient. Il a délié les morts de leurs linceuls, et les gestes qui se révélaient stériles engendrent déjà la paix, la communion, la justice.
Nous osons espérer ! mais si nous espérions, ce n’est pas uniquement, ni d’abord parce que nous aurions besoin d’espérance. Non, cette espérance-là ne dépend pas de nos états d’âme : nous ne créons pas notre espérance, nous la recevons, la visons !
« Consoler, consoler mon peuple », dit Dieu…
Les chrétiens n’ont qu’une parole à vivre : ils sont des hommes qui cherchent à faire la lumière jusqu’au plus épais des ténèbres.
Aucune situation ne peut tarir en nous l’avant-goût de la Nouvelle de Dieu : Dieu vient, et la vie le précède en chantant !
Michel Teheux
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