Le nœud de l’histoire : une croix
- Michel Teheux

- 23 nov.
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Christ Roi de l'Univers - 23 novembre 2025
Évangile selon saint Luc 23, 35-43

Un accord solennel aux grandes orgues, à la fin de la pièce, c’est beau, c’est grand ; cela réchauffe et rend courage.
« Tout a été créé par lui et pour lui ! Dieu a voulu qu’en lui toute chose ait son accomplissement.
En une vision magistrale, Paul dévoile le sens de notre histoire, personnelle et collective. Notre monde va vers son achèvement ; nous ne tournons pas en rond ; notre marche hésitante conduit quelque part ; le temps de nos épreuves nous rapproche du jour où tout sera lumineux et transparent.
Le Christ est le centre où se relient tous les fils ; il est le nœud qui tient tout l’univers. Si nous avions un point de vue instantané sur toute l’histoire, présente, passée et à venir, nous verrions chaque chose et chaque être rattachés au Christ ressuscité.
Toute chose a été créée en Jésus et pour lui. Au premier matin de l’univers, lorsqu’il se penchait sur la terre et la pétrissait amoureusement, Dieu avait devant les yeux son seul modèle : Jésus l’Adam parfait. Si Dieu crée le monde, c’est bien parce qu’il aime qu’il ne vit que pour donner. Dieu est amour, et donc partage : la création est l’autre face de l’Alliance qu’il offre à l’homme.
Dieu ne change pas. Comment découvrir cet insondable mystère d’un Dieu qui ne vit que pour se donner ? Comment comprendre que Dieu voit toutes choses à travers son amour pour le Fils unique ? Comment expérimenter un Dieu bouleversant, parce que bouleversé dans ses entrailles, puisqu’il ne vit que pour aimer ?
L’accord solennel, pour nous chrétiens, à des sonorités inattendues, curieuses. « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est l’Envoyé de Dieu ! » Parole de haine sans doute, mais qui n’entend aussi l’immense désarroi qu’elles expriment ? Le nœud de tout être et de toute chose, le sens de toute vie, le centre de l’histoire, c’est une croix !
Révélation suprême qui impose le silence et l’adoration ; celui qui est pour nous la clé d’interprétation de notre vie et de l’histoire du monde, c’est un homme suspendu au gibet d’infamie. « Tout subsiste en lui » ! L’Église dressera sur le monde le signe de sa foi, une croix élevée comme un jugement. Dieu n’a qu’un seul modèle devant les yeux : son Jésus crucifié !
Ce n’est pas par un souci de communion à la condition douloureuse de l’homme que Jésus se fait serviteur et s’abandonne au jugement des hommes.
A la table de la Cène comme sur le bois de la croix, Jésus va jusque là parce qu’il est l’image du Dieu invisible, la Parole du Dieu incompréhensible. Face à lui, il nous fait reconnaitre, sans pouvoir l’expliquer, que Dieu ressemble à quelqu’un qui se met à genoux et qui meurt abandonné. Jésus est notre Roi parce qu’en lui et par lui se manifeste à nous la souveraineté de Dieu, un Dieu crucifié par un amour bouleversant. Sans doute, Jésus sera-t-il ressuscité par Dieu, afin que soit manifestée sa royauté sur toutes choses ; mais le Ressuscité portera toujours les stigmates de sa croix !
Jésus, souviens-toi de moi » ! Seule, la prière d’un brigand a découvert quelque chose du mystère. Parce que, seul, un cœur de pauvre peut oser croire à tant d’amour.
Oui, peut-être devons-nous connaitre, quelque part en nous-mêmes, la dérision de la croix, le drame de la souffrance, l’abandon total pour pouvoir risque sur nos lèvres les mots de la foi.
Et, lorsque nos n’aurons plus à offrir qu’une vie défaite par trop de souffrances et de désespérance, alors, Dieu lui-même pourra renouer les fils distendus. Notre « souviens-toi de moi » sera exaucé, car Dieu, déjà, voit en nous son Fils, son unique, en qui tout subsiste et trouve la vérité.
Michel Teheux



