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Photo du rédacteurMichel Teheux

En Avent !

1er dimanche de l’Avent — 1er décembre 2024

Évangile selon saint Luc 21, 25-28.34-36



« Ce jour-là les hommes mourront de peur… »

Loin de moi la tentation de me laisser aller à une rhétorique de crainte mettant devant vous tous les malheurs qui peuvent nous arriver. Ils sont trop évidents : chacun de nous connaît la fragilité de sa vie, de sa santé, de ses relations affectives, de son plaisir, de son bonheur ; chacun de nous connaît les embarras de nos sociétés, les dédales de nos mesquineries politiques, les interrogations sur le devenir de nos civilisations, les inquiétudes sur le sens de ce que chacun peut appeler avec un désarroi certain « l’aventure humaine ».

 

Loin de nous une rhétorique de la peur ; la Bible ne l’a jamais développée et lorsque prédicateurs ou magistère de l’Église s’y sont abandonnés, ils étaient très loin de la Bonne Nouvelle que constitue l’annonce de l’Évangile.

Oui, c’est une annonce qui, ce matin, nous est faite et cette annonce est une bonne nouvelle.

« Ce jour-là, les hommes mourront de peur… mais, vous relevez la tête, car votre délivrance approche » !

Une sorte de frémissement nouveau, ce matin, saisit l’Église, pour ouvrir cette nouvelle année, un cri nous réveille : « En Avent ! Relevez la tête, votre délivrance approche » !

Dans la fatalité où nous sommes emportés comme des bulles dans les flots du courant, dans le fatalisme né de notre désarroi devant tant de forces qui nous menacent et sur lesquelles nous n’avons aucune emprise, un appel nous parvient qui nous atteste : « Relevez la tête : vous n’êtes pas enfermés dans le cercle infernal d’une histoire sans avenir » !

 

Bonne Nouvelle de l’Avent : vous marchez vers le jour du Seigneur !

Y aurait-il encore cent mille ans, ce monde-ci, ce monde cassé d’où la justice et l’amour se sont retirés, ce monde de gens qui tournent en rond pour avoir excommunié l’amour, ce monde passera pour faire place au monde nouveau, au jour de Dieu.

« En ce jour-là, chante le psaume, justice fleurira et grande paix pour toujours » !

L’aveugle verra que l’amandier est en fleurs et le prisonnier que la nuit touche à sa faim.

Nous ne sommes pas dans une histoire de fous qui ne ferait que recommencer inlassablement, toujours là même, désespérément bouclée sur elle-même.

 

En Avent ! Un slogan de marcheurs pour ouvrir une nouvelle année, pour nous dire les uns aux autres que le temps avance, non pas enroulé sur lui-même, mais qu’il nous permet de nous approcher de la fin de l’histoire, son terme et sa finalité. Une nouvelle année nous est donnée pour faire avancer le temps vers les accomplissements, pour poser les jalons qui permettent à la caravane humaine de s’avancer vers l’aboutissement de l’aventure des hommes, temps de justice, de paix, d’amour et de bonheur.

 

« Redressez-vous et relevez la tête » !

Voyez les signes dans le ciel et sur la terre ! Pour les marcheurs, l’étoile est lointaine, mais elle indique la route ; pour le cultivateur, le premier bourgeon est prémisse de printemps et de la récolte de l’été.

Regardez le regard de deux époux qui se croise et il vous apprendra que l’amour ne va pas à sa perte, regardez deux mains qui se nouent, fut-ce par-dessus les barbelés et vous saurez que la paix est possible ; écoutez la parole de réconfort qui accompagne le mourant, l’encouragement que relèvent les bras fatigués et vous apprendrez que l’avenir est à la tendresse !

 

On me dira : vous êtes optimiste de nature, ouvrez les yeux et regardez la réalité d’une vie qui n’est pas tendre.

On m’accusera : vous endormez les gens et les empêchez de prendre leurs responsabilités.

On me traitera de rêveur et d’utopiste : seuls les durs s’en sortent et, de toute façon, l’histoire n’est pas une montée vers le progrès, trop de déconvenues nous l’ont appris, à nos dépens bien souvent.

 

Et je dirai : vous avez mille fois raison.

Mais l’Évangile est joyeuse annonce, engagement révolutionnaire, préfiguration.

Nous annonçons la portée sacrée, éternelle, de tout geste qui van dans le sens de la vie et de l’homme.

Nous sommes engagés dans une histoire qui nous dépasse de partout, car nous avons la responsabilité d’enfanter demain.

Nous préfigurons la terre nouvelle et devons être aux avant-gardes de l’humanisation de l’homme, éclaireurs de l’éternité.

Le temps de l’Avent est celui d’une tension en avant fondée sur l’ordre qui nous parvient : « relevez-vous » !

Et c’est parce qu’il sera le temps de l’obéissance à cette invitation pressante qu’il sera temps de révélation, temps de l’enfantement ; « votre rédemption approche » !

 

Les ténèbres enserrent le monde. La nuit se fait épaisse et parfois terrifiante.

Mais au cœur de la nuit, une petite flamme suffit pour briser l’étau des ténèbres, une étincelle vacillante porte déjà en elle la victoire du jour, la chaleur de la lumière et l’éblouissement de midi.

« En Avent » ! un cri fait reculer la nuit : il s’est levé le jour de Dieu qui fait renaître terre et cieux.

Michel Teheux



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