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  • Photo du rédacteurMichel Teheux

Dévisager

2e dimanche de Carême - 25 février 2024

Évangile selon saint Marc (Mc 9, 2-10)



Ils étaient montés sur la montagne, là où Dieu se révèle.

Et ils virent Jésus, vêtu de blanc et de lumière. Son nouveau vêtement dit ce qu’il est. Jadis ne disait-on pas : « je vais me changer ». Lorsqu’on passait un autre costume pour sortir ?

Il y avait l’habit de fête, celui du dimanche et la tenue de tous les jours et les habits de travail. Ne dit-on pas de quelqu’un : « Il a une bonne présentation » ? Et si l’habit ne fait pas le moine, chacun sait aussi que la parure n’est pas seulement pour la galerie. Il avait été revêtu de lumière et les disciples étonnés découvraient un autre Jésus. « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ».

 

Ils étaient montés sur la montagne, là où Dieu se révèle.

Et ils découvrirent le visage de Jésus. Voir le visage…

Il raconte la vie. Visages des enfants, ouverts comme la vie devant eux. Visages des adultes aux traits burinés et volontaires. Visages des vieux qui portent les cicatrices de la vie, il racontait sa vie, il portait la marque de trente années silencieuses passées auprès de la Vierge et des siens, de l’atelier de Joseph, dans un village perdu de province, au milieu des paysans et des artisans. Il avait grandi en leur compagnie, il avait appris l’homme à travers la vie en commun avec eux. Le visage de Jésus portait les marques de Nazareth et de tout ce qui fait la vie d’un homme ordinaire. Et pourtant, pour ceux qui crurent en lui, le visage de Jésus n’était pas que cela.

Il ne réfléchissait pas seulement le terroir, son regard était à tout instant, celui du Fils unique. Nourri de la Gloire du Père, il portait témoignage de cette Gloire. Le visage de Jésus, visage d’un artisan galiléen, est encore l’autre face de Dieu, l’autre visage de Dieu.

 

Ils étaient montés sur la montagne, là où Dieu se révèle.

Et ils découvraient la face cachée de Dieu : Dieu était tellement amoureux de l’homme qu’après avoir parlé de bien des manières il avait pris chair d’homme pour découvrir à quel point il est passionné de l’homme. Dieu ne parlera plus que des hommes, il sera homme.

 

Quel visage de Dieu devons-nous accepter lorsqu’il se révèle en Jésus ?

Les hommes avaient imaginé des dieux à leur image : tout-puissants, vindicatifs, omniscients ? Nous ne croyons pas ni en un Dieu qui se fait prier et dont il faut modérer les colères aussi justes et saintes fussent-elles. Quel visage de Dieu devons-nous accepter lorsqu’il se révèle en ce Fils, lorsque Jésus est reconnu comme le reflet du Père ? Quel visage de Dieu devons-nous accepter lorsqu’il se révèle dans ce Jésus qui échoue si lamentablement, qui ne trouve d’autres compagnons que ces pêcheurs, qui est vaincu par une cause de théologiens politiciens, à qui on intente un procès et que l’on condamne comme illuminé et révolutionnaire ? Oui, on hésite à croire que tout ce qui se passe en cette vie se passe en Dieu ; « Qui m’a vu a vu le Père » ! Dans un visage défiguré par la douleur, couvert de crachats, corps disloqué, écartelé. Jésus était ce qu’il est, sa vie se déroulant comme nous la voyons se dérouler, que devons-nous dire de Dieu ?

 

Dieu est amour, alliance. Et Dieu donne tout. Il livre son Fils, son autre lui-même.

Nouvelle qui bouleverse les données, révolution dans les rapports en Dieu et les hommes. Depuis toujours l’humanité cherchait à se transfigurer, à se transformer. Sur la montagne, nous découvrons qu’il nous faut accueillir le visage d’un homme et nous revêtir, comme dit ailleurs Saint Paul, nous revêtir de Jésus Christ. Il nous faut « nous changer » passé par la Pâque. Nous sommes alors renvoyés dans la plaine, là où se passe la vie des hommes, bêtement humaine. Sans doute en notre monde, tout amour est-il plus ou moins mutilé ; mais il y a, en tout amour, assez d’amour pour laisser entrevoir ce qu’est l’amour lorsqu’il n’est qu’amour, quand rien ne limite sa puissance d’accueillir et de donner. Il y a assez d’amour dans l’amour pour connaître qui est Dieu.

 

Pour ceux qui veulent « se changer » en revêtant le Christ, comme en transparence de leur vie de tous les jours, se laisse deviner une autre couleur : ils sont déjà revêtus de Dieu.

  

Michel Teheux




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