Christ Roi de l'Univers - 24 novembre 2024
Évangile selon saint Jean 18, 33b-37
Déroutant est ce titre de roi donné au Christ alors qu’il le refusait. Rappelons-nous qu’il s’est enfui quand le peuple voulait le faire roi après le miracle des pains.
À Pilate qui l’interrogeait, il répondit : « C’est toi qui dis que je suis roi ». Il a parlé plus volontiers du Royaume, réalité des derniers temps, cachée aujourd’hui, et qu’il faut faire advenir.
En fait, si Jésus refusait cette appellation, c’est qu’elle ne pouvait être vraiment comprise qu’après la résurrection. Alors, ce mot a pris tout son sens, puisque la résurrection est la naissance d’un monde nouveau, le début de rapports transfigurés entre les hommes, une ouverture décisive de la terre vers Dieu.
Nous aussi, donc, c’est dans la lumière pascale que nous intérioriserons ce titre du Christ. Toute la Pâque : l’humiliation et la gloire, la souffrance et la victoire.
Dans cette « Pâque du Christ, une vie nouvelle est inaugurée où toute créature est appelée à exister enfin pour Dieu, en Dieu.
Le Royaume des temps nouveaux.
Notre regard sur le Christ commence dans le prétoire de Pilate. Cette conversation entre Pilate et Jésus n’est pas une chronique judiciaire du journaliste Jean, mais une réflexion en profondeur sous la forme d’un dialogue où tous les mots ont leurs poids. Au cœur du débat, le sens de la royauté du Christ. « Elle ne vient pas du monde », dit Jésus, c’est dire qu’elle n’est pas l’aboutissement d’espoirs humains, qu’elle n’est pas à mettre sur le même pied que les pouvoirs des hommes. Ce qu’il en dit ensuite conduit à une réalité mystérieuse à laquelle on accède par la foi, par l’écoute de la Parole.
La suite du récit de la passion nous conduit à ce paradoxe : c’est sur la croix que le Christ est intronisé comme roi. Là, il est exalté et rend témoignage à la vérité.
Car cette vérité, c’est l’amour de Dieu, c’est le désir qui est en Dieu que rien de ce qu’il a créé ne soit perdu.
Gardant en mémoire ce passage du Seigneur par la mort, notre regard s’élève vers la gloire qui en est l’achèvement. L’Apocalypse, le psaume, le livre de Daniel la décrivent en images scintillantes. Elles ne font qu’évoquer, car comment dire ce qui est au-delà de tout mot ? Mais cette évocation est un chemin offert à la foi, à la contemplation, à la louange et au repentir de tous les hommes.
Nous voici donc amenés par cette fête à regarder intensément le Christ mort et ressuscité. Nous voici encore conduits à exprimer par nos mains ce que nos yeux ont vu. Car le Royaume déjà là doit encore advenir. À travers un passage de souffrance et de mort, il doit se manifester en toute la création.
À nous donc d’accorder nos mains et nos voix. Nous chantons la louange du Seigneur, que nos mains le servent. Nous proclamons sa royauté, que nos gestes l’annoncent. Nous reconnaissons en lui la vérité, qu’elle transparaisse en nos vies.
Proclamer la royauté et la seigneurie du Christ sur tout être et toute chose, annoncer comme une révélation l’attestation que la Pâque du Sauveur est à l’œuvre en cet âge et en tout temps, que la Résurrection des réalités du monde, c’est confesser que le Serviteur de Dieu est consacré parce qu’il a aimé passionnément et Dieu et l’homme jusqu’au bout et même dans le scandale de la foi.
C’est, dès lors, autre chose que de s’avancer triomphalement, bannières au vent, pour chanter « Christ vaincra » ! C’est, consciencieusement se mettre à la suite du Serviteur. Pour servir et Dieu et l’homme.
Confesser le Christ Roi c’est s’engager dans la voie royale de l’Évangile de Pâques.
Sans attendre cependant je ne sais quelle perfection, nous prendrons chacun notre place dans la louange de l’Église. Elle nous emportera à la recherche de Celui qui vient. Elle mettra en nous l’énergie du monde nouveau.
Michel Teheux