8e dimanche du temps ordinaire - 2 mars 2025
Évangile selon saint Luc 6, 39-45

Chers Frères et Sœurs,
Profitons ensemble de ces derniers jours pour voir encore la vie en vert – le vert liturgique étant le symbole de la permanence et de la croissance – ; ce vert qui ne réapparaitra que dans quelques mois, après la Pentecôte. Portés par cette couleur ordinaire qui nous conduit aux portes du désert intérieur, la Parole de Dieu nous invite aujourd’hui à une ultime introspection sincère et profonde. En effet, les Lectures de ce jour nous offrent une triple recommandation propice à notre propre croissance : le discernement du cœur, la fermeté dans la foi et la purification de notre regard sur nous-mêmes et sur les autres.
Premièrement, le Siracide nous rappelle une vérité essentielle : c’est dans l’épreuve que se révèle véritablement ce qui habite notre cœur. En d’autres termes, comme le tamis secoué révèle ce qui est déchet, les épreuves éprouvent les pensées de l’homme. Bref, nos paroles et nos réactions demeurent le reflet de ce que nous portons au plus profond de nous-mêmes. Vous l’aurez donc compris, afin de nous préparer à discerner ce qui déborde véritablement de notre cœur, le Carême à venir peut devenir ce temps privilégié pour sonder notre cœur, pour discerner en nous ce qui est bon et ce qui doit être purifié. Comment ? Déjà en nous posons ces simples questions : Quels sont les désirs qui nous habitent ? Quelle est la source de nos paroles ? En réalité, c’est cet appel à prendre conscience du poids de nos désirs exprimés par nos propres paroles que Jésus nous pose dans l’Évangile : « Ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur. » Ainsi, si notre cœur est rempli de rancune, de jugement ou de médisance, nos paroles en seront le reflet. À l’inverse, si nous l’habitons de la présence du Christ, nous deviendrons des sources de vie et de miséricorde.
Deuxièmement, dans sa lettre aux Corinthiens – tout comme il y a deux semaines souvenez-vous – saint Paul nous rappelle à nouveau le cœur de notre foi : « La mort a été engloutie dans la victoire ». Dès lors, cette victoire du Christ sur la mort, c’est-à-dire Sa résurrection, ne peut que nous inviter à nous recentrer sur le fondement de notre foi. Plus précisément, la résurrection demeure cet appel à l’Amour, cet appel à fonder notre propre vie dans la certitude que le Christ est « le chemin, la vérité et la vie ». Par conséquent, en résonnance avec le thème de cette année jubilaire, saint Paul nous invite à envisager notre foi comme le bâton du pèlerin afin de nous préparer à vivre le Carême comme un chemin d’espérance, c’est-à-dire comme un pèlerinage en laissant cette espérance nous transformer jour après jour, pas après pas. Bref, un chemin à vivre non pas comme un temps de tristesse, mais bien une occasion de nous attacher plus fermement à l’essentiel : Dieu Lui-même. Voilà pourquoi nous sommes appelés aujourd’hui à nous préparer à fortifier notre foi sans nous laisser ébranler par le temps de désert à venir, ainsi qu’à persévérer dans le bien, tout en sachant que notre labeur pour le Seigneur n’est pas vain. Nos efforts de conversion, nos renoncements, nos prières et nos actes de charité ont donc un sens profond : ils nous configurent à Jésus et nous enracinent dans la victoire de la Résurrection.
Enfin, comme dernier appel à la purification de notre regard critique sur nous-mêmes et le monde, Jésus nous avertit avec l’image de la poutre et de la paille : avant de vouloir corriger les autres, nous devons d’abord nous purifier nous-mêmes (Purifier signifiant ici avoir un regard ôté de toute critique, de tout jugement). Notons qu’il ne s’agit pas d’un simple appel à l’humilité, mais bien d’une véritable conversion de ce regard. Dès lors, afin de nous aider à être transformés par cette Parole de Jésus Lui-même, gardons en mémoire cette question : comment pouvons-nous aider les autres à avancer si nous ne reconnaissons pas nos propres blessures et nos propres fautes ? En ce sens, le Carême à venir est déjà cette invitation à ne pas tomber dans la facilité du jugement, mais surtout cette invitation à aller plus loin, c’est-à-dire à travailler sur notre propre sanctification surtout lorsque Jésus affirme dans sa parabole que le bon arbre se reconnaît à ses fruits. Cette affirmation ne peut que nous engager à aborder également d’autres questions qui habiteront nos semaines à venir : Avons-nous tendance à voir les défauts des autres avant de reconnaître les nôtres ? Sommes-nous prompts à accuser plutôt qu’à pardonner ? Ainsi, c’est en travaillant sur notre propre cœur en demandant au Seigneur de nous purifier que nous grandirons tels de bons arbres débordants de bons fruits : l’espérance, la miséricorde, la bonté. Ainsi, c’est laissant nos racines puiser à la source de notre foi, la résurrection, que nous deviendrons de véritables témoins de l’Évangile.
Pour conclure, chers Frères et Sœurs, à quelques jours du Carême, accueillons ces trois recommandations comme des balises qui guident le pèlerin vers sa destination, comme un guide spirituel : examinons notre cœur pour voir ce qui l’habite réellement et laissons-nous purifier par Dieu ; affermissons notre foi dans la victoire du Christ et persévérons dans le bien ; changeons notre regard sur nous-mêmes et le monde pour grandir dans l’humilité et la miséricorde. Ainsi préparés, nous pourrons vivre un Carême véritablement fécond et riche en fruits, un chemin vers la lumière de Pâques.
Aussi, que le Seigneur purifie nos cœurs, affermisse notre foi et ouvre nos yeux pour que nous soyons des témoins authentiques de Son amour.
Amen. Alléluia.
Frédéric Kienen