Évangile de Matthieu (22, 15-21)
Quel parti prendre
Les Pharisiens, auxquels se sont joints exceptionnellement les Hérodiens, collaborateurs déclarés du pouvoir romain, veulent mettre Jésus dans l’embarras.
« Est-il permis ou non de payer l’impôt à l’empereur » ? Grave question pour les Juifs ! Payer l’impôt, c’est reconnaitre le pouvoir de l’occupant et se compromettre avec ceux qui font d’un homme un dieu ! Refuser de payer, c’est s’offrir à la pression et prendre le part de ceux qui veulent chasser les Romains les armes à la main pour établir ici-bas le Rège de Dieu !
« Rendez à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu » !
On ne dressera pas l’homme contre Dieu ou Dieu contre l’homme ! On ne devra pas choisir l’un ou l’autre, l’un contre l’autre ; on devra prendre le parti de l’un et l’autre. Jésus s’en va vers le Golgotha précisément pour montrer que Dieu et l’homme ne seront jamais des concurrents ni des rivaux.
« À Dieu rendez ce qui est à Dieu » ! Jésus l’affirmera devant Pilate : « Mon Royaume n’est pas ce de monde » ! L’homme aura bien cultivé son jardin, le fruit viendra parce que le soleil l’aura fait mûrir. Les hommes peuvent travailler sans relâche, le jour du Seigneur viendra comme un voleur. Ce que Dieu apporte est bien plus qu’un changement d’environnement : « Voici que je fais toutes choses nouvelles » ! Choisir le parti de Dieu, c’est croire qu’il nous convie à une récréation.
Dieu veut atteindre le cœur ! Rendez à Dieu ce qui est à Dieu ! Lui seul peut refaire la beauté de l’homme, le sauver. Lui seul peut demander tout, car il a tout donné. Lui seul peut exiger un attachement à nul autre pareil, car sa loi est celle de la miséricorde, qui est le contraire de l’esclavage. Il faut se rendre à Dieu, et cette obéissance vise à libérer l’homme. Rendre à Dieu, c’est nous abandonner et nous en remettre à celui qui fait toutes choses nouvelles.
« À César, rendez ce qui est à César » ! Prenez au sérieux votre tâche d’hommes !
Ce que vous n’avez pas fait à ces petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait !
Nous voici loin d’une consigne d’indifférence ou de mépris à l’égard des réalités terrestres, comme si celles-ci salissaient les mains de l’homme ! « Dans l’attente du jour du Seigneur, faites donc tout pour que le Christ vous trouve nets et irréprochables » ! Dans le provisoire de l’existence, nous voici engagés pour l’enfantement de la terre promise.
À Dieu et à César ! Tension difficile à vivre. Indispensable si nous ne voulons pas rendre Dieu et l’homme concurrents l’un de l’autre. Tension qui prend parfois des allures de chaos : querelles sur l’enseignement libre, lois sur le divorce, l’avortement, options contradictoires pour l’organisation de la société…
Personne n’y voit clair, personne ne peut y voir clair. Chaos ? Peut-être, mais le chaos est ce qui précède la genèse. Le chaos, c’était le monde avant que Dieu ne créât les choses par la puissance de sa Parole.
« À Dieu et à César » ! On peut aujourd’hui essayer de prendre les Églises au piège de questions insidieuses, mais les questionneurs ne devraient pas ignorer que Jésus fait le procès de ceux qui voudraient choisir les voies trop simples en excluant l’un ou l’autre des deux termes.
« Rendes à Dieu et à César » ! Le Royaume s’enfante dans les difficiles ajustements de l’Incarnation de la Parole, dans les visages parfois contradictoires de la fidélité à l’Évangile, dans les tentatives de l’Église pour être vraie. Jésus nous provoque au possible que nous devons produire et il nous promet l’impossible que nous devons attendre du Père, le possible à réaliser et l’impossible à recevoir.
Michel Teheux
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