Conférence de Mgr Jean-Pierre Delville
Église Notre-Dame de la Sarte, 14 août 2023
Les saintes de la ville de Huy au 13e siècle sont des femmes religieuses de différent type : fondatrice d’hôpital et recluse, comme Ivette de Huy ; béguine, comme Isabelle de Huy ; figures mythiques comme les martyres Odile, Irma et Ida. Examinons successivement chacun de ces cas.
1. Ivette de Huy Ivette de Huy (1158-1228) est restée célèbre pour avoir contribué efficacement à agrandir la léproserie de la ville et pour s’y être installée le reste de sa vie comme recluse au service des lépreux et des bourgeois de la ville. La vie de la bienheureuse Ivette de Huy a été rédigée en 1229 par le père prémontré Huguesde Floreffe, à la demandede Jean de Huy, abbé de Floreffe de 1220 à 1238, qui était le confesseur d’Ivette et la considérait comme sainte. Son nom latin, écrit « Iuetta », peut se transcrire à la fois comme « Juetta », comme « Jutta » ou comme « Ivetta ». Les auteurs récentsoptent pour la dernière forme : je les suivrai en traduisant le nom par « Ivette ». Celle-ci apparaît comme une des saintes femmes des diocèses de Liège et de Cambrai promotrices d’une dévotion nouvelle dans l’Église aux 12e et 13e siècles et actrices d’une vision nouvellede la femme dans la société. Seize biographies nous sont ainsi parvenues, dont les plus célèbres sont celles de Marie d’Oignies(1167-1213), Lutgarde de Tongres (1182- 1246) et Julienne de Cornillon (1193-1258). Ivette est parmi les pionnières ; elle a fait l’objet d’un chapitre dans l’ouvrage célèbre de Georges Duby, «Dames du XIIe siècle », et d’un roman historique de Clara Dupont-Monod, « La passion selon Juette». Elle est présentée ici comme une icône du féminisme, dans sa résistance opiniâtre à l’impérialisme des hommes. La position d’Ivette est donc l’objet de débats historiques intenses. Dans le présent chapitre, je me limiterai à préciser sa position par rapport à la collégiale Notre-Dame, après avoir évoqué sa vie à grands traits. Ivette est née à Huy en 1158, d’une famille aisée. Son père, Othon, était l’administrateur du château de Huy pour le compte du prince-évêque Raoul de Zähringen (1125-1167-1191). À peine âgée de 13 ans, elle est mariée de force et aura trois enfants de son mari, pour lequel elle n’éprouvait aucun amour. Mais en 1176, le mari décède et Ivette se retrouve veuve à 18 ans. Malgré la résistance de son père, elle décide de rester veuve. L’évêque se laisse convaincre par la volonté d’Ivette de ne pas se remarier et il décide de lui accorder la bénédiction de veuve. Lui-même était sensibilisé à la condition des femmes dans l’Église, puisque son formateur, Hugo, chanoine de Mayence, était le frère de sainte Hildegarde de Bingen (1098-1179). Pendant cinq ans elle élève ses deux fils Henri et Eustache, le troisième étant mort jeune. Elle donne ses richesses aux pauvres, mais son père l’oblige à investir ses propriétés de manière rentable, pour assurer l’avenir de ses fils. La mère d’Ivette s’engage dans la vie monastique. À partir de 1181, Ivette s’investit comme soignante à la léproserie de Huy, le long de la rive gauche de la Meuse ; elle collecte de l’argent pour construire un vrai hôpital et une église. Ce sera le futur Hospice des Grands Malades ou de Sainte-Madeleine. Des hommes et des femmes s’agrègent à elle ; elle construit un couvent pour les femmes, qui s’occupent des malades. Son père entre à l’abbaye des chanoines réguliers de Neufmoustier, puis à l’abbaye cistercienne de Villers. En 1191, elle entre dans l’ermitage construit le long de l’église et elle y est renfermée solennellement par l’abbé d’Orval, Remy de Longuyon. En 1192, son fils Henri termine des études de lettres et entre à l’abbaye cistercienne d’Orval, dont il deviendra abbé de 1226 à 1228 et sera connu sous le nom de Henri de Stenay. Vers 1195, Eustache, le second fils d’Ivette, arrête une vie dissolue et entre à l’abbaye cistercienne de Trois-Fontaines, en Champagne. En 1209, la collégiale de Huy est réorganisée et placée sous la directiondu doyen, Thomas, qui est en fonction de 1206 à sa mort en 1212. Peu après, Ivette appelle le doyen de Huy à la fenêtre de sa recluserie et lui reproche sa gestion négligente de la vie chrétienne à Huy. En 1221, l’abbé prémontré de Floreffe, Jean de Huy, devient le confesseur d’Ivette ; il est aussi un intime de l’évêque de Liège, Hugues de Pierrepont (1165-1200-1229). En 1226, une sœur de la communauté de la léproserie fonde avec Ivette deux autels dans la chapelle, avec des revenus suffisants pour qu’ils soient desservis par des chapelains. L’évêque soustrait ces autels à l’administration du doyen de Huy et les place sous l’autorité de l’abbé de Floreffe. En 1225, Henri, fils d’Ivette, devient abbé d’Orval. En 1228, il est appelé par sa mère à son chevet, mais il ne réussit pas à arriver avant sa mort. C’est l’abbé de Floreffe qui accompagne Ivette et entend sa confession générale. Elle décède le 13 avril à l’âge de 69 ans et est enterrée dans l’église de l’abbaye de Floreffe. Elle est donc fêtée le 13 avril. En 1229, l’abbé Jean commande au frère Hugues de Floreffe, qui était un ami intime d’Ivette, de rédiger sa biographie.
Ivette n’a pas manifesté durant sa vie de désir de propager l’évangile ou d’aller en croisade combattre les hérétiques. Mais elle s’engageait au service des malades et envisageait de contracter la lèpre à son tour. Elle se battait mentalement contre le démon. Mais à la fin, elle se barricada dans sa recluserie de sorte qu’aucun homme ne puisse l’atteindre. Ivette a été poursuivie par les assiduités d’un jeune prêtre licencieux de Huy. « Elle vécut à la fin de la période de revival religieux synisactique, qui avait conduit des hommes et des femmes à vivre proches les uns des autres dans l’imitation de la vie itinérante de Jésus et de ses disciples […]. Leurs efforts de transcender le sexe par l’encratie dans des communautés dédiées au bien-être spirituel et physiques des nouvelles populations de pauvres avait été salué avec scepticisme et mépris par un clergé à l’affût de scandale ». Cette vie synisactique caractérisait le groupe qui vivait autour de Norbert de Xanten, initiateur des prémontrés. Mais elle était critiquée par le clergé qui venait de se voir imposer le célibat en 1139 au Concile de Latran II. Suite à cela, les prémontrés renoncèrent à créer des communautés conjointes d’hommes et de femmes. Bernard de Clairvaux condamne aussi le synisactisme. Mais certains ecclésiastiques regardaient les femmes mystiques comme des personnes qui élevaient les fidèles vers le ciel. C’est le cas de Jacques de Vitry, qui admire Marie d’Oignies et écrit sa vie. Quoique évêque d’Acre, il a passé dix anscomme évêque auxiliaire de Liège sous Hugues de Pierrepont : il assista celui-ci lorsqu’il mourut à Huy en 1229 et fut son exécuteur testamentaire, avec Jean de Floreffe. En cette fonctionil a eu certainement un mot à dire sur l’organisation de la léproserie de Huy. Jean de Floreffe a protégé et guidé Ivette, comme Jacques de Vitry l’a fait pour Marie d’Oignies. C’est pourquoi il a chargé un de ses chanoines d’écrire la vie d’Ivette. Il discernait en elle une forme nouvelle de sainteté, même si elle n’entrait dans aucune sorte de vie consacrée d’alorset qu’elle vivait comme ermite près d’une église de léproserie. Elle n’était pas obsédée par le salut des âmes du purgatoire. Elle eut la joie de savoir que son plus grand péché, celui d’avoir désiré la mort de son mari, avait été pardonné. Dans son humilité, elle ne voulait pas étaler ses joies spirituelles. Elle se plaçait sous la protection de la vierge Marie. Elle se dédiait au bien-être spirituel de sa communauté de femmes. Elle avait un don de conseil et d’écoute exceptionnel. Elle s’est consacrée beaucoup à son hôpital et au soin de malades.Elle était une sainte pour les temps modernes, une sainte pratique qui exerçait la générosité. Comme l’écrit Hugues de Floreffe, il faut « croire aux vertus des Saints de ce temps-ci». La position d’Ivette par rapport à la Collégiale de Huy et par rapport au clergé local est très critique. Les chapitres 26, 27 et 32 de sa Vita concernent respectivement le sacristain de la collégiale, le doyen et un prêtre. Voici d’abord le premier récit : il concerne l’abus commis par un clerc sur une femme en pleine église. « (81) Il y avait dans l’église de la Bienheureuse Marie toujours vierge, dans la ville fortifiée de Huy, un clerc exerçant l’office de sacristain. Il s’était épris d’une femme de la même ville, femme de vie honnête, comme on pensait à tort; sous l’impulsion du diable, il pécha avec elle, de nuit, dans l’église, car il lui semblait qu’il n’y avait pas de lieu plus apte et plus secret pour opérer cette turpitude que l’église dans laquelle il dormait. Ce fait ne put rester longtemps caché à la Vénérable Ivette. Elle connut par l’Esprit tout ce qui s’était passé : les personnes, le temps, le lieu et l’heure. Mais avant tout, elle fit venir à elle la femme, car elle lui était quelque peu familière, et lui exposa ce qu’elle avait connu par l’Esprit. Elle la convainquit de son erreur, durement comme elle le méritait, concernant ce qui était arrivé. Celle-là fut très honteuse, car elle était effrayée d’avoir été prise sur le fait dans son péché. Elle confessa alors dans l’ordre tout ce qui lui était arrivé et elle s’engagea volontairement et avec un cœur fervent à réparer, de sa propre volonté et sa propre intelligence, ce qu’elle avait commis contre le Seigneur et sa sainte mère, qu’elle craignait d’avoir fort offensée, parce qu’elle avait perpétré un tel délit, dans le lieu qui est à son nom. Ainsi elle rentra chez elle, remerciant Dieu, dont elle sut manifestement qu’il avait eu soin de son salut, comme elle l’avait compris par sa Servante [Ivette]. (82) Quant au clerc, il fut appelé par la Servante de Dieu, plus d’une fois, pour qu’il fasse lui aussi pénitence pour son péché. Il méprisa l’invitation à venir, parce que le diable avait aveuglé les yeux de son cœur, pour qu’il ne reconnaisse pas celui par qui et pour qui il était appelé à la pénitence, par le ministèrede sa Servante, à qui tout cela avait été révélé, je pense, pour le salut de chacun. Finalement il fut averti, via un intermédiaire, par la Sainte de Dieu, ou de venir la voir, ou de réparer devant Dieu ce qu’ilavait commis, sans quoi il devait savoir que le jugement de Dieu serait imminent. Néanmoins il négligea consciemment ce qui lui était [signifié]. Mais après peu de temps, suivant la parole de la Bienheureuse Femme, le même clerc fut pris étonnamment d’une maladie soudaine et il mourut misérablement, sans aucune communion ecclésiastique et sans le saint sacrement. » On remarquera dans ce texte combien la femme, qui a couché avec le sacristain dans la collégiale Notre-Dame, est toute excusée par Ivette et son biographe. Elle a la franchise de parler à Ivette de ses actes et de demander pardon à Dieu. Par contrele clerc est présenté comme totalement impénitent et rétif à toute repentance. Il est puni par une mort rapide. Ivette de son côté apparaîtcomme l’autorité morale de la ville. Elle bénéficie de révélation du ciel et connaît les consciences. Elle fait venir les gens à elle pour leur parler et demande qu’on se confesse à elle. Elle assume un rôle de direction spirituelle incontestable. Autant elle est délicate avec la femme victime, autant elle est intraitable avec le clerc coupable. Notons au passage comment Ivette est dénomméepar son biographe: « Venerabilis Ivetta », « Famula Dei », « Ancilla sua », « Sancta Dei », « Beata Mulier ». Le chapitre 27 présente aussi une critique de l’Église de Huy, en la personne du doyen de la Collégiale, Thomas, focalisé sur l’argent.
« (83) Il y avait dans l’église Sainte-Marie, un doyen menant, comme on dit, une vie relâchée ; parmi tous les vices dans lesquels il était plongé, il cultivait l’avarice, qui est un esclavage des idoles ; de plus beaucoup affirmaient qu’il était publiquement un prêteur d’argent à gage. À ce sujet, ravie en son esprit, elle vit la bienheureuse Mère de Miséricorde et Vierge Marie,comme si elle était assise dans l’assemblée des saints ; elle se plaignait gravement à son Fils Juge à propos de ce doyen, du fait qu’il violait l’église consacrée à son nom à elle, par des faits et des gains honteux. Mais elle voulaitse consoler du fait que, sous peu, une sentence à ce sujet allait sortir du Juste Juge, le Christ, mais surtout son fils, à savoir que [le doyen] allait être trainé dans les supplices éternels de la Géhenne, où par sa bouche, ses narines et ses yeux, le feu, que de son vivant il avait allumé, s’échapperait à brides abattues, à cause de ses péchés, pour lesquels il avait mérité la colère. (84) Une fois disparus le jugement du président et la gloire de la vision, immédiatement elle recommanda au doyen de bien vouloir venir lui parler. Et quand il vint à elle, elle lui ouvrit en confession tout ce qu’elle avait vu et entendu à son sujet, et elle le persuada par ses prières de corriger ses erreurs, de faire pénitence de ses faits passés et de les arrêter dans le futur, tant que Dieu patientait pour qu’il fasse pénitence. Mais lui, écoutant cela comme un serpent sourdqui ferme ses oreilles pour ne pas admettre la correction de celle qui le priait, se retira tel qu’il était arrivé, si pas pire, ne se souciant en rien ou très peu de ce qu’on lui racontait, comme si c’était des rêves de la nuit. Et pour que s’accomplisse le discours que la bienheureuse Vierge lui avait dit, après peu de temps, le doyen fut misérablement soustrait à la lumière de ce monde. » On constate dans ce texte à nouveau la position supérieure d’Ivette par rapport au principal ecclésiastique de la ville de Huy. Elle manifeste sa réticence à admettre le prêt à intérêt et elle accuse le doyen de Huy d’en profiter indûment. Elle convoque le doyen à se confesser à elle, alors que normalement une femme se confesse au prêtre et non l’inverse. Elle se considère donc comme l’interprète du jugement de Dieu. Au chapitre 32, l’auteur de la Vita décrit comment un prêtre de la collégiale avait séduit une femme et avait entretenu longtemps une relation avec elle dans les logements de la collégiale: « (91) Il y avait dans la ville forte de Huy, un prêtre qui bénéficiait d’une réputation d’honnêteté ; il dormait dans un espace de l’église principale. Il y avait dans la même ville une femme de mœurs honnêtes ; celle-ci, entre autres œuvres de vertu, aimait tellement la Mère de Dieu, la Vierge Marie, que de jour comme de nuit, elle la saluait en fléchissait cent fois les genoux, par la Salutation angélique, c’est-à-dire le ‘Je vous salue, Marie, pleine de grâces, etc.’ et rien ne pouvait l’empêcher de participer aux matines toutes les nuits, si ce n’est peut-être seulement une maladie du corps. Le prêtre, la voyant souvent rester seule dans l’église, lui adressa fréquemment la parole ; il brûla de concupiscence envers elle et commença à concevoir l’iniquité en son cœur par des rencontres et des salutations mutuelles, jusqu’à ce que, par la suite, ce qu’il avait conçu de mal produisit son effet, en un exécrable exemple de crime. Suite à des regards mutuels et des conversations familières, la ferveur de la religion et le zèle pour la dévotion s’attiédirent chez la femme ; une sécurité imprévoyante commença à induire en elle la torpeur et la négligence de sa vertu antérieure ; cela fit en sorte de produire la perte de son propre salut, jusqu’à ce que, le mal suintant en eux commede la graisse, ils passèrent tous les deux à l’affection du cœur. Tandis que la concierge était endormie à la chaleur du jour, ils furent également excités dans leurs parties naturelles et ils se retrouvèrent longtemps à des heures qu’ils avaient déterminées l’un et l’autre dans le lieu sacré de l’église, à savoir là où le prêtre dormait habituellement. Comme le péché qui, par pénitence, n’est pas aussitôt renvoyéà plus tard entraîne un autre par son poids, ils furent poussés par le poids du péché,ils furent livrésà un sens défectueux, de sorte que la cause du premier péché devint la peine du péché suivant et qu’ils affectèrent leurs corps l’un à l’autre outrageusement dans un lieu si sacré. Ainsi la dernière erreur devient pire que la première, quand le péché par usage et par comportement, comme par une habitude vicieuse, entre en putréfaction dans les vasesdu péché, comme[le corps de Lazare] quatre jours dans le tombeau. (92) Que dire de plus ? Finalement vint pour la vie de la pauvre femme le terme qu’elle ne put éviter. Prise de fièvre, elle garda le lit. Mais le détestable prêtre craignit d’être dénoncépar la confession de la femme s’il se faisait qu’elle se confesseà quelqu’un ; ou peut-être craignit-il que par peur de la mort à venir, elle voudrait se corriger de la volonté de pécher encore. C’est pourquoi, par l’intermédiaire d’une vieille femme qu’ils avaient depuis longtemps mise dans la confidence de leurs paroles et de leurs secrets, il fit savoir à la malade alitée qu’elle ne fasse pas confession de cela, parce que, disait-il, il apparaissait que cette maladie n’était pas mortelle. Et celle-là crut à ces paroles mensongères plus qu’il ne fallait ; elle fut trompée et s’appuyant malheureusement sur de vains espoirs, elle emprunta la route de toute chair. (93) Durant la nuit suivante, la Bienheureuse Femme fut ravie par l’Esprit et vit la Bienheureuse Mère de Dieu, prosternée aux pieds de son Fils unique, demander une vengeance à l’encontre de ce prêtre malfaisant, parce qu’il avait séduit si méchamment sa servante, alors que celle-ci, de son vivant, l’avait tellement vénérée, [elle la Mère de Dieu], par zèle d’amour et respect de louanges, et ainsi le prêtre avait été pour elle la cause de sa perdition éternelle. Le matin venu, [Ivette] fit venir le prêtre à elle et elle lui raconta dans l’ordre tout ce qu’elle avait vu à son sujet. D’abord il eut très peur et se demandait avec beaucoup d’étonnement qui l’avait accusé, puisqu’il n’avait confié son péché à personne sinon à la vieille femme. Il commença à s’excuser comme il pouvait. Puis il allégua qu’il ne fallait pas croire à n’importe quel esprit, il multipliait les paroles et proposait des raisons vraisemblables à la Sainte de Dieu pour s’excuserde ses péchés. Mais celle-ci répéta ce qu’elle avait vu et lui dit : « Je te le dis, pour le salut de la pécheresse Ivette (en effet elle avait toujours l’habitude de s’appeler ainsi), que, hier soir, quand je suis allée au lit, j’ignorais tout cela et je n’avaisjamais entendu une mention de cela par aucun mortel. Mais sache que si tu ne fais pas bientôt pénitence pour ce que tu as commis et si tu ne cherches pas à apaiser la Vierge Marie, que tu reconnais avoir fort offensée, tu sentiras que la colère du Seigneur et sa vengeance vont te menacer prochainement. Le prêtre, ayant entendu ce discours, confessadans les larmesqu’il avait mal agi contre Dieu et qu’il croyait que le jugement de Dieu pesait sur lui. Il commença à crier comme une femme qui accouche par l’angoisse de la douleur et de la peur. Il déchira son visage avec ses ongles, il arracha les cheveux de sa tête, il frappait sa tête contre le mur, criant qu’il était le seul misérable et était digne de mille morts. (94) Alors la Bienheureuse Femme commença à le consoler pour qu’il ne tombe pas misérablement dans le désespoiret lui dit que selon elle il y avait place pour la pénitence et qu’il y avait un temps pour la miséricorde. Et que Dieu, dans son excellence, était au- dessus de la malice des hommes, qu’il ne voulait pas la mort du pécheur et qu’il fallait seulement désespérer pour la pauvre qui était morte si misérablement. En effet, que le bois tombe au sud ou au nord, quel que soit l’endroit où il est tombé, il sera là. Quant à lui, touché à cette heure par la douleur intérieure du cœur, il s’engagea à émender au mieux sa vie en tout selon la volonté et la sagesse de la Sainte Femme. Et il dit même qu’il entrerait bientôt dans l’ordre cistercien pour faire désormais pénitence tous les jours de sa vie et que, du reste, il voulait racheter le temps passé par de bonnes œuvres. Mais bientôt, à peine fut-il sorti et se fut-il éloigné du visage de la Servante de Dieu, qu’il oublia tout ce dont il avait vœu, il rejeta derrière lui les discours de la Sainte, et il reprit sa place avec les adultères. Mais pas pour longtemps ! Peu de temps après, intercepté misérablement par les cadavres de ses péchés,il exhala son dernier souffle. Et peu après, il suivit d’une manière désespérante celle qu’il avait envoyée peu avant chez les orques [divinités de l’enfer]. » Ce texte, aux allures dramatiques, dénonce le comportement d’un prêtre de la Collégiale Notre-Dame, qui a dévoyé une fidèle de l’église et en a fait sa concubine. La description de la relation entre le prêtre et la femme est décrite avec psychologie. Le prêtre est décrié plus que la femme, même si celle-ci meurt avant de s’être confessée. Tout est de la faute du prêtre, la perdition de la femme et la sienne propre. Ivette a intuitionné cela par une vue de l’Esprit. Elle espère convertir le prêtre, mais celui-ci ne fit qu’une pénitence de surface. Il manifesta un grand mépris pour Ivette, ce qui est dénoncé dans la Vita. Il mourut dans son péché. Le lieu du péché, les locaux de l’église, aggrave la faute. Aucun prêtre de la Vita n’est présenté de façon positive, tous sont pécheurs. Les autres acteurs ne sont pas dénoncés, mais leur indifférence est épinglée, qu’ils’agisse de la concierge à la porterie ou de la vieille femme, confidente des amants. Grâce à ce texte, nous assistons quelque peu aux coulisses de la collégiale et nous découvrons l’opposition d’Ivette au clergé local. Ce point de vue sera racheté par les chapitres voisins (30 et 35), qui valorisent le clergé des monastères prémontrés ou cisterciens, par opposition au clergé séculier. Notons que la Vierge Marie est présentée comme une juge sévère, qui défend la cause des femmes. Elle est choquée par ce qui se passe dans la collégiale qui lui est dédiée. C’est comme si la patronne était mécontente de son personnel ! C’est ce qu’Ivette perçoit en se mettant aux côtés de la patronne et donc, au-dessus du clergé de la collégiale. Hugues de Floreffe valorise aussi le sens de l’eucharistie qu’Ivette vivait : elle est sensible à la communion avec le Christ et au ressenti intérieur, plus qu’aux les cérémonies extérieures (36 et 40). Cela renforce le rôle de la femme dans la célébration. 2. Isabelle de Huy Ceci nous permet de faire le lien avec Isabelle de Huy. Celle-ci n’est connue que par la Vita de Julienne de Cornillon (1192-1258), rédigée vers 1263. On peut situer vers 1230 la rencontre de Julienne avec Isabelle. On ne sait que peu de chosesdes béguinages de Huy, mais la rue des Béguines, au-delà de l’église S.-Remy, atteste qu’il y avait des béguines à Huy. Celles-ci faisaient partie du large mouvement béguinal né à Liège et Nivelles vers 1150. Voici ce que dit la Vita de Julienne au sujet d’Isabelle :
« Julienne désira ardemment avoir une compagne pour l'institution de cette sainte solennité et elle trouva Isabelle de Huy. Julienne, la servante du Christ, désirait de tout son cœur qu'une autre personne attache son nom à la nouvelle solennité qu'il fallait mettre sur pied; elle désirait avoir une personne proche qui ressentirait ce qu'elle ressentait, avec qui elle pouvait partager ses désirs et à laquelle elle pouvait communiquer ne fût-ce qu'un peu ce que, entre-temps, elle ne pouvait cacher tant elle en était emplie. Elle entendit alors parler de la réputation et de la célébrité d'une certaine béguine, du nom d'Isabelle, habitant Huy, qui était très estimée par les personnes religieuses qui la connaissaient. Elle était en effet d'une admirable patience, d'une humilité parfaite, d'une amitié immense, bref douée de beaucoup de grâce et de vertu […]. Ayant entendu cette réputation, Julienne, la servante du Christ, s'arrangea pour que cette Isabelle soit reçue comme sœur dans la maison du Mont-Cornillon. Comme la vierge du Christ s'était aperçue au cours d'entretiens qu'Isabelle avait une pensée éclairée par le Seigneur pour comprendre les choses spirituelles et divines, elle voulut cependant un jour vérifier si elle n'avait pas reçu de Dieu quelque secret céleste sur l'institution de la nouvelle solennité du Sacrement. Et comme elles parlaient quelque peu ensemble des merveilles de ce sacrement, sœur Julienne lui demanda ce qu'elle pensait d'une fête spéciale à promulguer pour ce Sacrement, en action de grâce, en son honneur et pour sa gloire. Mais elle […] elle répondit simplement : “ Et de quoi, Madame, les cœurs pieux font-ils quotidiennement la fête si ce n'est de ce sacrement? ” Alors sœur Julienne, percevant dans cette réponse, que rien ne lui avait été révélé à propos de la connaissance du secret qui lui avait étédévoilé, ne se comporta pas autrement que si elle avait eu le cœur transpercé par un glaive à double tranchant […]. Mais sœur Isabelle, au vu de son visage et de ses gestes, comprit la force de la douleur qu'elle avait provoquée par sa simple réponse, ou plutôt par son ignorance. Sachant qu'elle ne ressentait pas ce que Julienne ressentait à ce sujet, elle pria personnellement le Seigneur avec insistance pendant tout un an […]. Ce laps de temps révolu, je ne sais pourquoi elle décida d'aller chez [Ève] la recluse de Saint-Martin. Comme elle approchait de la recluserie, et qu'elle voyait la porte de l'église ouverte, elle y entra pour prier et se prosterna devant le crucifix. Et voilà qu'en un moment,en un clin d'œil, elle fut ravie vers les cieux; alors le Seigneur lui montra comment la fête spéciale du Sacrement avait toujours existé dans le secret de la sainte Trinité; il lui révéla que le moment était venu où arrivait la fin des temps pour les hommes et où cette très sainte solennité devaitleur être publiée. Et elle voyait toutes les armées des ordres célestes priant le Seigneur en des prières continuelles et dévotes pour qu'il se dépêche de manifester, un jour enfin, au monde en péril cette nouvelle solennité qu'il avait tenue cachée jusqu'à présent […]. Revenue sur terre, depuis ces hauteurs célestes, elle eut un tel désir de faire connaître au monde cette solennité […] qu'elle disait parfois qu'elle parviendrait à elle seule à instaurer cette solennité dans l'Église, même si le monde entier s'y opposait obstinément; cette confiance lui était donnée par la volonté de Dieu qu'elle connaissait à ce sujet. Elle raconta à sœur Juliennece qu'elle avait vu en extase; celle-ci tressaillit d'une immense joie parce qu'elle avait un témoin sûr de la volonté divine : en effet le Seigneur avait fait de celle-ci sa compagne et son associée non par l'écoute humaine mais par révélation et connaissance pure. À partir de ce moment, Julienne, la vierge du Christ, conversait fréquemment et familièrement avec elle en un très doux langage à propos de l'institution et de la promotion de la sainte fête ». Ce texte montre d’abord qu’Isabelle était connue à Huy comme une béguine de premier plan. Elle était assez indépendante, car en 1230, les béguinages étaient loin d’être constitués. Elle accepte donc l’invitation de Julienne à venir habiter l’hôpital de Cornillon à Liège. Julienne espère avoir en elle une confidente dans son inspiration de promouvoir la fête du Saint-Sacrement. Dans un premier temps, elle ne trouve pas d’appuien Isabelle. Mais après que celle-ci eut bénéficié d’une vision à ce sujet dans la collégiale S.-Martin, elle devint une ferme promotrice du projet de Julienne. Ainsi on voit comment la condition de béguine et d’hospitalière conduit les deux femmes à une attente mystique d’une fête pour l’eucharistie. Lors de la persécution qui touchera Julienne, Isabelle l'accompagnera en exil avec deux autres religieuses. En 1252, Isabelle convainc Julienne de s'installer à l'abbaye de Salzinnes, chez les cisterciennes. Elle meurt là-bas entre 1252 et 1257. Elle n’est pas reconnue comme sainte et ne bénéficie pas d’un culte après sa mort. 3. Odile, Ida et Irma Le milieude saintes femmestrouve une opportunité énorme de dévotiondans la découverte des reliques de sainte Ursule et des Onze mille Vierges. D'après une légende du 9ème siècle, Ursule et ses compagnes remontaient le Rhin. Alors qu'elles arrivaient à hauteur de Cologne, elles furent attaquées par les Huns et martyrisées. Il semble que le noyau historique soit une église dédiée à onze vierges martyrisées au 5ème siècle.Une mauvaise lectured'une inscription ancienne transforma le 11 en 11 000. Entre 1155 et 1164,des fouilles exécutées à proximité de l’église Sainte-Ursule livrèrent de nombreuses reliques. Les visions d’Élisabeth von Schönau (1129-1164) contribuèrent à accréditer leur authenticité. Les ossements découverts par l'abbesse de Sainte-Walburge à Cologne provenaient en fait de la découverte d'un cimetière romain. Ceci est une illustration supplémentaire de l'essor du rôle des femmes dans l'Église, puisqu'on ajoute d'un seul coup à la dévotion un énorme contingent de saintes, avec leurs reliques. Celles-ci sont dénombrées par le bienheureux Hermann Joseph (1150-1241), prémontré de Steinfeld. Les croisiers, fondés vers 1210, puis officiellement à Huy en 1248, bénéficient d’un don de reliques de trois des saintes martyresvers 1292. Ils font faire pour cela une châsse, qui existe encore aujourd’hui (conservée à Kerniel et prochainement transférée à Hasselt) et offre un des premiers exemplaires de peinture de nos régions. On y voit en particulier sainte Odile qui étend, en signe de protection, son manteau sur les saintes Ida et Imma. Ces trois saintes sont donc des saintes légendaires. Mais ce qui est frappant, c’est le développement de leur culte et le fait que les croisiers de Huy aient fait de sainte Odile la patronne de leur ordre (fête le 18 juillet). Dans ce cas-ci, c’est grâce à des hommes que les femmes sont saintes ! La Collégiale Saint-Jacques de Liège a recueilli, en provenance du couvent des croisiers, une statuette médiévale de sainte Odile et une relique de son crâne. En conclusion on notera combien,à travers ces femmes, est valorisée la condition de la femme dans l’Église. La femmeincarnée par les saintes de Huy émergede la société avec une autorité nouvelle. Elle est inspirée grâceaux révélations qu’ellereçoit de Dieu,elle est activepar rapport aux malades, exerce la pastorale de la confession, refuse la domination de l’homme, en particulier dans le mariage, participe activement à l’eucharistie, témoigne de sa foi par le martyre. Ceci, sur fond d’opposition au clergé séculier, surtout celui de la Collégiale Notre- Dame.
Bibliographie
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