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LE COMBAT CÉLESTE

Photo du rédacteur: Michel TeheuxMichel Teheux

Noël des Cathédrales

Collégiale Notre-Dame de Huy - 20-22 décembre 2024



Le combat des Anges

Noël des Cathedrales

Sur une idée et un texte de Michel Teheux

une création de Luc Petit

une production des Nocturnales



Narrateur :

 

Les lendemains s’annonçaient chantants.

Euphorie des âges d’or que l’on croit éternels.

Sécurité des certitudes qui se confirment.

Effervescence des projets qui se nourrissent de rêves.

Les ravins des craintes étaient peu à peu comblés,

les collines des désarrois aplanies,

les embuches vaillamment repoussées :

demain sera lumineux,

le chemin rocailleux de nos devenirs

S’aplanira pour ouvrir un horizon sans limites.

 

Hier, en ce temps-là déjà,

en ce temps qui déjà apparait « autrefois »,

la terre bruissait d’étonnement :

nous prenions naissance aux profondeurs du jardin d’Eden !

Nos jours avaient le goût du paradis

Et nous goûtions même aux fruits qu’on nous disait défendus

 

Là-haut dans le ciel,

les anges eux-mêmes s’étonnaient :

« Bonheur sur la terre ! Longue vie pour les hommes ! »

 

Hier, en ce temps-là déjà devenu autrefois,

l’euphorie des commencements transfigurait les jours des enfantements

et, dans le ciel, les anges, comme un vent de ramiers qui s’élève,

dansaient pour consacrer les aventuriers du possible.

 

*

 

C’était hier, en ce temps-là, déjà devenu autrefois !

Les rêves inconscients, comme des baudruches,

n’ont pas survécu à l’évidence de la nuit.

L’émerveillement qui fait genèse

N’a pas résisté aux dénis de la réalité !

La terre est redevenue terre, terreuse, glaise.

Sournoisement, victorieusement la fatalité s’est imposée,

comme la langue d’une bête dévorante, implacable.

Mais là-haut, dans le ciel,

le vol des ramiers s’est mis à hésiter, avant d’atterrir :

les anges des genèse ont délaissé leur sarabande intemporelle

pour assumer leur mission,

être les alliés des combats des hommes redevenus terreux.

 

Au livre de l’Apocalypse, on lit :

« Je vit le ciel ouvert et un Ange, debout sur le soleil, Michel, et ses anges avec lui.

Je vis alors la Bête, un dragon rouge feu, à sept têtes et dis cornes. En arrêt devant

la femme en travail, prêt à dévorer son Enfant aussitôt né ! »

 

Sournoise, comme une hydre à mille têtes, effrayante. On l’appelle « la fatalité ».

Elle attaque. Partout. Toujours. Elle piétine la moindre assurance ; elle dévore tout

les bien-être : elle déchiquète tous les répits.

De manière imprévisible, la fatalité a peint la terre en noir, le noir du sang qui sèche

sur les blés, le noir des tombes sur les cœurs broyés.

 

Où êtes-vous couleurs de fête, le rouge et l’or, les chants et les danses ? Où êtes-vous

les couleurs du rêve, le bleu du vent des libertés, le vert des jeunes sèves ?

Il faut appeler les anges au secours.

Il faut appeler Raphaël, l’ange guérisseur : qu’il vienne briser l’étau infernal de nos

infirmités et de nos démissions !

 

L’Ange Raphaël :

 

Relevez la tête ! Redressez-vous ! Moi Raphaël, je vous l’annonce, aucune nuit ne peut désespérer que se lève l’aurore même si les heures du matin ignorent encore le jour !

Ne vous laissez pas désarçonner par les augures de malheur. Ne vous laissez pas envahir par le doute qui démobilise vos ardeurs, ne permettez pas que soient écrasés les échecs de vos efforts et les déconvenues de vos entreprises.

Éloignez les défaitistes et les peureux !

N’acceptez pas qu’on rejette les acteurs de vos renouveaux !

Ne tolérez pas qu’on réduise au silence les porteurs de vos espoirs,

que soient cloîtrés les annonciateurs de vos lendemains !

Ne vous laissez pas voler vos rêves !

 

Je suis Raphaël, je guéris toutes peines, j’affermis avec vos désirs ! Je fais monter vos projets plus haut encore !

 

Narrateur :

 

Oui… mais la nuit reste la nuit !

Lune et soleil ne peuvent briser les ténèbres ;

les collines restent toujours escarpées et les étés souvent pourris !

Le vent est trop souvent bourrasque de malheur et tempête dévastatrice ;

les ombres deviennent masque de laideur !

La fatalité se fait dévorante

et le dragon, invaincu, démultiplie ses tentacules mortifères.

 

Narrateur :

 

Raphaël, dis-nous : où sont les joies qui permettent vraiment d’espérer ?

Où sont les cris de victoire qui certifient la réussite de nos espoirs ?

Oui, toi Raphaël, l’Ange guérisseur, dis-le-nous !

 

L’Ange Raphaël :

 

Laissez-moi vous dire :

Quand les étoiles s’éteignent, il ne reste plus qu’à risquer d’aller là où elles nous convoquent !

J’appelle Michel, le chef des troupes célestes ! Avec vous il va mener le combat :

il convoquera toutes les forces du Bien pour vous conduire à la victoire.

 

L’Ange Michel :

 

Levez-vous ! En avant !

Conjuguez l’impatience de toutes les espérances, la ferveur de toutes les recherches, l’entêtement de tous les passagers : ils appellent moins la fin d’un monde que le début d’un autre !

Je suis Michel, l’Archange « du côté du Dieu ». Pour soutenir votre combat je convoque tous les espérants et les chercheurs : ils sont fiers de leur courage et de leur patience, chaussés de prières et vêtus de foi ; ils vont parce que l’avenir est devant eux ; ils marchent parce que leur chemin est celui de ceux qui croient aux lendemains.

 

Narrateur :

 

En avant !

Vous les annonceurs de printemps, soyez les hérauts de l’impossible devenu possible !

Les mains distendues renouées, les barbelés arrachés, les fusils brisés, les corps meurtris soignés, les solidarités affermies… amassez vos témoignages !

 

L’Ange Michel :

 

Le jour naît en pleine nuit, la mort se déchire, la frayeur peut se disperser comme les brouillards au soleil.

Que vos combats nous disent où en est la nuit ; qu’ils soient la voie secrète qui annonce Noël !

Car… l’entendez-vous, le prophète ?: « Voici venir, dit-il, comme un fils d’homme ! »

 

Toi, Gabriel, l’Annonceur des naissances, as-tu trouvé la maison de Nazareth, l’atelier du charpentier ? Et la jeune fille qu’on appelle Marie ?

 

L’Ange Gabriel :

 

Oui, Michel, tout est prêt !

 

« Bonjour Marie ! » Quel bonheur de te visiter !

Tu es jeune, tu es donc de la race de l’avenir.

Tu es femme entre toutes les femmes, tu peux accoucher du futur.

Tu vas enfanter !

Je suis Gabriel, l’Entremetteur.

Je vais convoquer tous les chercheurs et les attendants : qu’ils te fassent procession et que tous les âges te disent bienheureuse !

 

Narrateur :

 

« Me voici ! »

Chuchotée. Frémissant comme un baiser, la réponse bouleverse le cours de l’histoire !

« Me voici ! Qu’il me soit fait selon ce qui m’est dit ! »

« Fiat ! » a dit Marie. Réponse maladroite qui scelle l’alliance entre le ciel et la terre.

Acquiescement qui donne corps à la victoire de la Vie.

 

« Comment cela va-t-il se faire ? »... Les anges qui, déjà, s’affairent derrière Gabriel, se questionnaient.

Marie, elle, ferme les yeux : elle apprend à devenir mère. Elle regardait le ciel et souriait aux anges : son garçon, elle avait décidé de l’appeler Yechoua, Jésus.

 

Il va pousser son premier cri…

Anges du ciel, hâtez-vous !

Raphaël, le Guérisseur qui panse les blessures du corps et celle des âmes, Michel, le Commandeur de Dieu, le Combattant suprême, Gabriel, l’Annonceur, le Premier Évangéliste, levez les troupes célestes, précipitez-vous vers Bethléem !

Il faut recueillir ce cri, ce premier cri.

Ce cri qui va bouleverser la terre. De Siècle en siècle, ce cri qui va étonner Dieu lui-même et le mettre du côté des combats des hommes !

 

Et vous, les anges, portez ce cri jusqu’aux confins de la terre !

Entonnez la grand’messe de ce premier Noël !

« Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ! »

Montez haut pour faire part de la naissance, annonciers des temps nouveaux !

 

Messagers de Noël, balisez les routes de l’Univers !

Courrez annoncer la nouvelle au nord et au midi, à l’est et à l’ouest : s’il faut ouvrir des chemins, c’est qu’il faut partir ; s’il faut tracer des sentiers, c’est qu’il faut des découvreurs de l’inconnu, des franchiseurs d’obstacles, des perceurs de tunnels, des déblayeurs d’avenir.

Soyez les porte-paroles de la victoire de tous les combats : l’Enfant n’est donné que pour survenir ; il est surprise et naissance, pour faire naitre.

 

À Bethléem, il n’y a rien à voir, mais là se donne à entendre une parole à consentir.

Le miracle de Noël, c’est le chemin à faire : naitre et toujours renaitre.

 

Au-dessus du hameau d’où l’aube vient, une myriade d’anges s’échangeait la nouvelle comme des roulements de tambours répétés à l’infini.

 

Noël n’est pas une historiette. Noël n’est pas à raconter, Noël est à faire : Noël est un combat. Le combat de la vie.

 

Au-dessus des collines de Judée s’échappait comme un grand vol de ramiers.

Regardez là-haut : il hésite avant de tomber dans la forêt, de branche en branche.

Ce soir, Noël sera Noël !

Regardez : il pleut sur vous comme des plumes d’anges !

 

 

Michel Teheux



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