23e dimanche du temps ordinaire - 8 septembre 2024
Évangile selon saint Marc 7, 31-37
Contraste entre les dimanches ! La semaine dernière, on était en plein conflit avec les pharisiens, et cette semaine on plonge dans la joyeuse exubérance qui s’empare de la population de la Décapole.
Le Seigneur passe…
Provoquant, là une contestation, ici les acclamations.
Le Seigneur passe et le sourd-muet est poussé par les braves gens devant Jésus.
Lui, pensent ces hommes et ces femmes, est capable de le guérir et de le rendre à la condition d’homme. Guéri, il redeviendra un homme, communiquant avec les autres, rendu à la société.
Le Seigneur passe et ce sourd-muet est porté par l’enthousiasme de ses frères.
« la bouche du muet criera de joie… le Seigneur délie les enchainés…
Le Seigneur est ton Dieu pour toujours ».
Le Seigneur passe et cette mention des voyages de Jésus dans l’Évangile de Marc est bien plus qu’une indication géographique. La Parole et la puissance de Dieu parcourent la terre.
C’est aujourd’hui que la Parole et les signes traversent nos vies, provoquent accueil ou refus, question ou confiance.
Et nous serons amenés à la question fondamentale : « qui est-il cet homme-là ? ».
Le Seigneur passe et interroge : « Vois-tu quelque chose ? »
Jésus vous interroge : « Vois-tu quelque chose ? »
Il ne suffit pas que le pain soit déposé entre tes mains.
Lorsqu’on est tellement habitué aux choses, fût-ce les plus extraordinaires, on ne les voit plus !
Méfiez-vous du levain des pharisiens, morceau de pain desséché par l’habitude.
Plus on s’accoutume, plus il devient difficile d’ouvrir à nouveau les yeux pour s’étonner.
« Vois-tu quelque chose ? »
Je veux dire pour toi, l’Évangile reste-t-il une nouvelle ?
Désarçonnante, inespérée.
Dieu a-t-il toujours pour toi le goût de l’inconnu et de l’aventure ?
Peut-être l’Évangile est-il devenu comme le buffet Henry IV, hérité de la grand-mère. Bien utile certes, indispensable même, mais qu’on a toujours vu dans la salle à manger, si bien qu’on ne le voit plus.
Dieu n’est-il pas devenu pour toi l’indispensable inutile ?
« Vois-tu quelque chose ? »
Il ne suffit pas que nous célébrions le Repas du Seigneur pour faire automatiquement mémoire de sa mort et de sa résurrection.
Il faut encore faire mémoire aujourd’hui !
Nous ne nous souvenons pas d’un geste qui appartiendrait au passé ; nous n’entretenons pas le souvenir d’un disparu en refaisant ce qu’il a fait la veille de mourir !
Méfiez-vous du levain des pharisiens, morceau de pain desséché, à force de vous tourner vers le passé.
« Vois-tu quelque chose ? »
Je veux dire : le partage du pain devient-il pour toi le signe et la source d’une vie livrée à l’amour ?
« Vois-tu quelque chose ?... Il faut que notre acte de faire mémoire devienne l’acte suscité par l’Esprit, la réponse à l’appel du Ressuscité : nous sommes faits pour vivre « chrétiennement ».
Il se pourrait que nous soyons affreusement aveugles devant le monde. Nous ne savons plus regarder le visage des hommes.
Qui ouvrira les yeux de notre cœur ?
Méfiez-vous du levain des pharisiens ; ils se sont enfermés dans une religion stérile et sans âme.
Mais toi, vois-tu quelque chose ?
Déjà Jésus vous a imposé les mains et vous avez commencé à voir.
Il suffit, il est vrai, d’un peu de levain pour faire lever la pâte.
« Vois-tu quelque chose ? » …
Laissez-vous encore toucher par le Christ et il arrivera que, les yeux éblouis par une si grande guérison, vous bondissiez de joie et rendiez grâce à votre Sauveur.
Cela seul s’appelle devenir chrétien.
Michel Teheux
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